Dans la mythologie automobile, la Porsche 911 Turbo occupe une place à part. Avec ses ailes larges et son aileron démesuré, elle n’était plus une voiture de sport sympathique mais une sulfureuse supercar. Puissante, brutale et difficile à conduire, elle ne se destinait pas aux ramollos mais bien aux héros du volant, ce qui l’a rendue d’autant plus désirable. A son volant, on passait pour un vrai mec, quitte à se planter au premier virage. C’est grâce au turbo que la 911 est entrée dans l’inconscient collectif des passionnés acnéiques.
Avec la toute dernière évolution, présentée à l’occasion du salon de Francfort 2015, c’est tout le contraire. Sur les 911 courantes, c’est désormais turbo obligatoire. Exit les magnifiques flat-six 3,4 l (350 ch pour 390 Nm) et 3,8 l (400 ch à 430 pour 440 Nm), tous deux atmosphériques, dont la sonorité glorieuse ainsi que le punch qui allait crescendo avec le régime-moteur faisaient oublier une direction pas franchement agréable. Place à un 3,0 l biturbo développant 380 ch pour 450 Nm en Carrera et 420 ch pour 500 Nm en Carrera S.
Alors oui, les performances progressent un petit peu : la Carrera gagne 6 km/h en vitesse de pointe (295 km/h en BV7) et perd 0,2 sec sur le 0 à 100 km/h (4,6 sec en BV7), tandis qu’à 308 km/h et 4,3 sec sur le 0 à 100 km/h, la S gagne 2 km/h et 0,2 sec respectivement.
Tout ça pour abaisser les consommations et donc, les sempiternelles émissions de CO2. La Carrera chute de 9,0 l/100 km à 8,3 l/100 km et de 211 g/km à 190. La S tombe de 9,5 l/100 km à 8,7 l/100 km et de 223 g/km à 199. Des chiffres concernant toujours les versions manuelles. Evidemment, ils sont normalisés, et comme on sait que les constructeurs allemands se sont livrés à un intense lobbying pour que Mme Merkel défendent leurs intérêts auprès de l’Europe et ses tests absurdes, ces derniers les avantagent bien évidemment. Aussi, ces chiffres sont-ils à prendre avec des pincettes, ou à ne pas prendre du tout d’ailleurs, surtout que quand on l’exploite à fond, un moteur turbo voit sa consommation grimper de manière exponentielle. En usage sportif, il est donc à parier que les nouvelles 911 consomment plus que celles qu’elles remplacent…
Elles seront certainement plus efficaces, grâce à leur couple en hausse, leurs pneus élargis (305 mm sur la S contre 295) et leur amortissement PASM revu. Surtout, la S pourra recevoir les roues arrière directrices, comme sur une Honda des années 80. Ou une Renault Laguna III. Ou une 991 GT3, j’arrête de faire la mauvaise langue.
A l’extérieur, on note un nouveau bouclier avant arborant des feux de jour amincis tandis qu’à l’arrière apparaît sur le capot moteur une grille rappelant les 911 des années 70.
A l’intérieur, là encore, la 911 suit la mode en adoptant un grand écran central tactile de 7 pouces couplé à système multimédia capable de générer du wifi, de piloter un smartphone et, accessoirement, de jouer de la musique (pas de trop, le moteur perdant sûrement en sonorité à cause des turbos).
Les prix ? Ils gonflent plus que les performances, avec un surcroît d’environ 6 000 € : à partir de 98 975 € en Carrera et 113 255 € en Carrera S. Mais notez qu’on économise 1 500 € de malus, même chez les riches, ça compte.
En somme, et c’est là qu’ironie il y a, la 911 des vrais sportifs (et des vraies sportives), c’est celle qui n’a pas de turbo : l’actuelle GT3. En outre, c’est elle qui préservera le mieux sa valeur, plus encore qu’avant, surtout si elle aussi connaît une évolution qui la fait passer à la suralimentation…
Exit les 3,4 l et 3,8 l (non 3,6L qui n’existe plus sur la 991 mais sur la 997).
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Mea maxima culpa, d’autant plus que j’avais la fiche technique de la Carrera S sous les yeux en rédigeant l’article. Merci de votre vigilance 😉
Pas de problème, le site est super, les articles sont très complets et la section occasion sportive est au top !
Bonne continuation 🙂
C’est un peu triste quand même, la 911 Turbo n’a désormais plus rien de spécial: elle va sans doute disparaitre du catalogue sous sa forme actuelle, vu qu’elle n’a plus d’intérêt…
Un 6 cyl Boxer Turbo c’est bien, mais je crains pour les Boxster et Cayman: les rumeurs de 4cyl se font insistantes… Pourquoi pas décliner le nouveau 3L Turbo avec une cylindrée un peu inférieure et conserver la noblesse du 6 Cyl?
Parceque franchement, 4 Cyl Boxer Turbo = Subaru Impreza ou un vulgaire 4 Cyl en ligne comme sur toutes les GTI du marché, ça ne justifie plus le tarif d’une Porsche.