Drôle de situation que celle de la Lotus Evora. Voilà une voiture qui marque une rupture franche avec les productions précédentes d’Hethel mais dont la carrière s’arrêtera en 2012, après seulement 4 ans. Dur de se faire une image dans ces conditions. Elle aura servi à effectuer la jonction entre les spartiates mais jouissives Elise (avec leurs dérivées Exige et Europa S) et la nouvelle gamme Lotus, voulue par PDG Dany Bahar, qui va s’attaquer aux Porsche et Ferrari.

La Lotus Evora S côté technique

Modèle de transition certes, mais Lotus à part entière tout de même, l’Evora profite d’un châssis en aluminium extrudé recouvert d’une carrosserie en synthétique. Le moteur V6 3.5, toujours signé Toyota, s’installe transversalement au centre et dans cette version S, reçoit une babiole dénommée compresseur. Voilà qui corrige le défaut de l’Evora de base : le manque de puissance. Autrefois cantonné à 280 ch, le moteur crache désormais 350 ch à 7 000 tr/min, avec un couple de 400 Nm au régime un peu élevé de 4 000 tr/min.
Vous allez me dire, peu importe, vu qu’une Lotus, c’est léger. Plus tant que ça à vrai dire puisque l’Evora S affiche 1 430 kg sur la bascule, soit 60 kg de plus qu’une Porsche 911 GT3 RS par exemple. Heureusement, cette masse reste prépondérante sur l’arrière, à 61 %.
Côté transmission, elle se range du côté de la simplicité avec une boîte manuelle à 6 vitesses : la boîte robotisée IPS de l’Evora de base n’est ici pas disponible, ce dont on pourra ne pas se plaindre.
Du sain et du classique aussi pour la suspension, qui recourt aux 4 coins à des doubles triangles mais se passe d’amortissement piloté.

A bord de la Lotus Evora S

C’est en découvrant le cockpit qu’on comprend pourquoi l’Evora S est pachydermique selon les normes de Lotus. Fini le dénuement des Elise et Exige, place aux hectares de cuir pleine fleur, aux jolis plastiques et à la ribambelle de gadgets (clim automatique, GPS…). Certes, l’assemblage n’est pas irréprochable (voire carrément négligé au niveau du coffre), mais enfin le dessin est moderne et la déco carrément branchouille avec ces diodes décrivant une ceinture lumineuse dans l’habitacle la nuit.
Malheureusement, le pédalier en alu, par la faute du passage de roue, va voir au centre de la voiture s’il n’y est pas et les places arrière conviendront au mieux à un petit enfant amputé des jambes. Comme cette banquette est une option, on fera tout aussi bien de ne pas la retenir.
Si le siège conducteur maintient parfaitement bien tout en offrant un moelleux judicieux, on pestera contre la visibilité médiocre vers l’arrière, après s’être contorsionné pour s’installer à bord. Cela dit, les habitués aux produits précédents de la marque nageront dans un océan de luxe et de confort tandis que les possesseurs de Porsche n’auront plus l’impression de s’asseoir dans une improbable cuvette d’aluminium.
Mais, si elle a remarquablement civilisé son habitacle, l’Evora S a-t-elle conservé ces qualités dynamiques qui ont fait la renommée de Lotus ?

Sur la route avec la Lotus Evora S

Sacha Marcassus, concessionnaire Lotus dans le sud de la France, a organisé pour ses clients, réels comme potentiels, une sympathique journée de roulage ayant pour point de base le château de l’Hospitalet, près de Narbonne.
Des routes bien sinueuses nous attendent. Une fois installé à bord, j’apprécie dans un premier temps la présence d’un accoudoir central (c’est à ce genre de détail qu’on se voit vieillir) et dans un second, m’habitue au pédalier excentré.
Par rapport à l’Evora standard, la commande de boîte affiche des progrès considérables, tant en ce qui concerne sa douceur que sa précision. Comme la direction s’avère judicieusement consistante, on se dit qu’on va bien s’amuser.
Même si elle a été durcie, la suspension demeure agréable, pour une voiture de sport s’entend, et filtre bien les inégalités d’une chaussée pour le moins dégradée. Comme le V6 s’avère bien insonorisé (tant mieux car sa sonorité est quelconque), on se dit que cette Evora S constituerait une bonne compagne de voyage, et à ce moment, les fans d’Exige doivent commencer à ouvrir le gaz.

Oui, Lotus fabrique des voitures confortables, mais quand on met les watts, ça déménage. Quel bienfait que ce compresseur : il transfigure les performances mais aussi et surtout l’agrément de conduite de l’Evora. Sans forcer, il vous catapulte à des allures propres à faire tomber Madame Cécile Petit (vous savez, la délicieuse déléguée interministérielle à la sécurité routière, qui a dû frôler la rupture d’anévrisme quand l’assemblée a très légèrement assoupli la règle de récupération des points de permis) dans une profonde dépression. Comme ça, sans avoir l’air d’y toucher.
On se sent d’autant plus enclin à les atteindre que le châssis s’avère magnifiquement amorti et superbement équilibré. Ça, c’est Lotus. Le compromis atteint semble encore supérieur à celui de l’Evora de base, car il procure un surplus de précision bienvenu.
Bien sûr, sur cette route ouverte, il n’est pas question d’aller chercher les limites, très éloignées, mais on peut déjà se faire bien plaisir en exploitant l’adhérence considérable de la voiture. Freinage pas trop tardif (mais quelle puissance et quelle endurance !), on se cale en virage, puis on remet progressivement les watts en débraquant, sachant qu’il y a tout de même pas mal de poids à l’arrière, même si l’ESP (déconectable) veille au grain. Si on remet les gaz très tôt et assez fort, on peut faire dévier la poupe en sortie de virage, d’autant qu’elle demeure très facile à rattraper.
En appuyant sur la touche ‘Sport’, on libère un peu l’échappement et repousse le rupteur à 7 200 tr/min : on l’impression que la route rétrécit et que les autres usagers se sont soudain arrêtés !

En revanche, si toutes les commandes sont très précises, on ne retrouve pas ce toucher de route exceptionnel qui rend la conduite d’une Europa S, notamment, totalement captivante. On n’a plus, par exemple, cette sensation d’appuyer directement sur les disques avant au freinage ni de ressentir la texture du bitume dans la jante du volant. Heureusement, l’Evora S a plus gagné en confort que perdu en capacité à retranscrire la route, le bilan est sauf, surtout qu’elle procure tout de même un plaisir intense.

Bilan

Affichée à 70 350 €, pack sport et diffuseur arrière en série, l’Evora S coûte 10 000 € de plus que le modèle de la base. C’est 9 000 € de plus qu’une Cayman S, mieux finie, plus fonctionnelle,  plus musicale mais tellement plus banale et certainement pas plus efficace. C’est aussi 16 000 € de moins qu’une 911 Carrera, un peu moins puissante (345 ch contre 350) mais autrement renommée. Bref, l’Evora S se heurte à rude concurrence, mais après tout, opter pour elle ne serait absolument pas ridicule d’autant qu’à ce niveau de prix, un peu surcroît d’exclusivité n’a rien pour déplaire. En l’équipant d’un pot inox qui va bien, la Lotus pourrait chanter comme il faut, mais reste à se satisfaire d’une position de conduite qui demande une accoutumance (l’absence de repose pied pourra gêner sur long trajet) et de détails de finition pas assez soignés. Encore un effort Lotus !

S.S.

 

Merci à Marcassus Sport pour le prêt de l’Evora S. www.marcassus-sport.com. 05 62 12 29 00. Marcassus propose aussi les PGO, Caterham, AC, Mastretta et KTM.

Essai d'exception : Lotus Evora S, à l'aise l'anglaise
Caractéristiques Moteur : V6, 3 456 cm3, compresseur Puissance maxi : 350 ch à 7 000 tr/min Couple maxi : 400 Nm à 4 000 tr/min Vitesse maxi : 277 km/h (constructeur) 0 à 100 km/h : 4,8 sec (constructeur) Prix de base : 70 350 € En vente : Maintenant
Moteur85%
Comportement90%
Qualité & Design75%
Confort & Pratique60%
Emotion95%
LES +
  • Châssis superbe
  • Surcroît de punch bienvenu
  • Confort
LES -
  • Position de conduite
  • Détails de finition
81%Note Finale
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89%

3 Réponses

  1. Rowhider

    J’aime beaucoup les Lotus, j’aime beaucoup la ligne de l’Evora, mais pour moi à ce prix ils pourraient offrir un moteur à sensations…
    Le V6 sans compresseur est indigne d’une GT, avec compresseur c’est mieux mais il chante pas assez haut.

    Je pense sincèrement que Lotus aurait tout à gagner à changer de motoriste: passer chez Renault par exemple? Le V6 3.5L de la 370Z ferait bien mieux pour moins chère dans l’EvoraS, le 2L Turbo de la Megane ferait mieux que le V6 dans l’Evora, et les Elises ne perdrait rien à monter le 1.6L Turbo de la Clio RS… D’autant plus qu’avec l’engagement en F1: l’alliance Lotus – Renault aurait du sens (même si Lotus Car n’a pas de lien avec Lotus F1).

    Sauf qu’avec la renaissance d’Alpine, il est sans doute maintenant trop tard pour Lotus: la futur Alpine sera sans doute positionnée juste en face l’Evora.

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