Nous sommes sur le circuit de Ricardo Tormo, non loin de Valence. À quelques kilomètres de là, les Formule 1 sont à l’essai au cœur de la grande cité espagnole en vue du Grand Prix d’Europe 2012. Mais le GP attendra. Sur la piste du ‘Circuit de la Communitat Valenciana’, c’est non pas une, ni deux, mais quatre McLaren MP4-12C qui n’attendent que nous, toutes habillés de couleurs différentes. L’arc en ciel n’est pas loin. Cela dit, nul besoin de faire un vœu : Paris grimace sous la pluie, frôlant les 15 °C, tandis qu’une brochette proprement ragoûtante des meilleures sportives du moment nous fait de l’oeil sous un soleil ibérique resplendissant.

Parmi les demoiselles présentes ce jour là, se trouve une Lamborghini Aventador. On l’observe en gardant ses distances. Dans sa teinte orange, la bête venue de Sant’Agata fait forte impression. Même au sein de l’univers des sportives les plus exclusives ne constate-t-on de pareilles proportions : à peine 1,14 m de hauteur pour plus de 2,26 m de largeur avec les rétroviseurs. Si bien qu’à ses côtés, l’esquisse discrète voire un peu fade de la MP4-12C n’attire certainement pas autant les mirettes. La Lamborghini est basse et terriblement large, tandis que la McLaren reprend des proportions standards de berlinette à moteur central arrière. Toutefois, l’envie d’en prendre le volant n’en est pas pour autant défaillante.

Avec sa teinte rouge Volcano, notre 12C est la plus jolie du lot.

Modèle technologique conçu sous l’égide de Ron Denis et doté d’un V8 inédit réalisé par la société Ricardo, la 12C possède un pouvoir d’attraction indéniable qui n’est en rien dû à sa plastique. Ni à ses plastiques d’ailleurs, l’auto étant couverte de carbone (le ‘C’ de MP4-12C est là pour le rappeler). Outre la coque (< 80 kg) sur laquelle repose l’ensemble de l’auto, l’intérieur ne fait pas non plus l’économie en fibre tressée. McLaren a également veillé à limiter au maximum le poids d’éléments tels que la ligne d’échappement, le système de freinage ou les jantes. Mais tout cela n’est pas vain. La 12C annonce une masse de 1 301 kg à vide (comptez 35 kg supplémentaires avec le pack carbone), et une rigidité sans faille. Ainsi, l’Aventador a beau dégainer 700 ch contre ‘seulement’ 600 pour la McLaren, cette dernière offre un meilleur rapport poids/puissance (2,17 kg/ch contre 2,25 pour la Lambo). L’auto la plus redoutable du plateau s’avère donc sans aucun doute la MP4-12C, et l’on s’apprête à en prendre le volant.

C’est au-dessus du seuil de porte, délicatement, que l’on passe son corps après sa jambe droite. Même au-delà de 1 m 80 cela dit, l’accès y demeure facile et c’est sans mal qu’on parvient à trouver une bonne position de conduite. Se caler correctement ne demande que quelques secondes, et malgré la présence d’une classique ceinture trois points, à aucun moment durant les tours de manège qui vont suivre n’aura-t-on l’impression d’être mal soutenu (bien sûr, on n’oubliera pas de maintenir fermement en place son derrière au fond du baquet via sa jambe gauche, qui n’a ici d’autre utilité). Malgré une position de conduite assez basse, la posture idéale ne demande pas au pilote de se retrouver allongé, et chaque commande essentielle tombe aisément sous la main. Un peu à l’image d’une 458 Italia, les commandes se regroupent autour du conducteur, de part et d’autre du volant ainsi que sur la console centrale, mais pas un bouton ne vient bousculer le dessin épuré du volant. Quant au passager, il n’est ici que pur spectateur, quoique le spectacle vaut le détour.

Tout comme à l’extérieur, l’ensemble présente au sein du cockpit une vraie sobriété. Là encore, la fonction prédomine, si bien que l’ergonomie ne souffre pas la critique. Parmi les différents boutons ou commutateurs, se trouvent sur la console centrale deux précieuses molettes. Situées côte à côte, chacune permet de choisir différents modes de conduite, ‘Normal’, ‘Sport’ ou ‘Track’, pour le châssis et l’ensemble moteur/boîte/sonorité. Sous un soleil de plomb et une température d’environ 35°C, l’auto a déjà fait quelques tours de piste. Moteur tournant, les réglages sont remis sur leur mode le plus souple par mon copilote d’un jour, tandis que je tends le bras gauche pour refermer la portière laissée dans sa position verticale. Dénommé Rob Bell, ledit copilote s’avère en réalité véritable pilote. Ayant depuis des années participé à de nombreuses épreuves d’endurance, il court aujourd’hui pour McLaren au volant de la MP4-12C GT3. En clair, il y a pire pour nous aiguiller sur le fonctionnement de la berlinette. Après une brève présentation de l’habitacle et de ses commandes, l’heure est venue de quitter la pitlane.

Placée en mode ‘Auto’ (réglages les plus souples sélectionnés), la 12C fait preuve d’une étonnante douceur à bas régime. Notamment lorsqu’on sait ce qui se cache en position centrale arrière. Le V8 3.8 biturbo à carter sec fixé à la coque carbone développe un maximum de 600 ch à 7 000 tr/min et 600 Nm de 3 000 à 7 000 tr/min. Soit à peine moins que ce que produisait le V12 d’origine BMW implanté dans la McLaren F1. Après quelques dizaines de mètres au pas le long des stands et alors que l’on tire sur la palette de droite (passant ainsi en mode manuel), aucun à-coup n’est pourtant à déplorer au passage de la seconde. Si une 12C avait un jour à subir un usage quotidien, la bête se montrerait sans doute étonnamment docile et civilisée. Du moins tant qu’on ne dépasse pas les 3 000 tr/min. En sortie de pitlane se trouve un virage à gauche, très serré. On se stabilise alors aux environs desdits 3 000 tr/min, et patiente le temps de parcourir ce premier virage. Quelques secondes plus tard, les quatre roues se retrouvent bien en ligne et aucune autre voiture ne se situe de ce côté du circuit.

Ci-dessous, le tracé du circuit espagnol Ricardo Tormo, situé non loin de Valence.

On met alors pied dedans… Whaaahaha ! Instantanée, la poussée se montre tout bonnement exceptionnelle. Alors que les turbos ne font preuve d’aucun temps de réponse, l’auto vous catapulte littéralement vers le virage suivant. Le corps se plaque sans ménagement contre le dossier du baquet et, lorsque les entrailles font un même mouvement vers l’arrière, on comprend soudain que l’accélération de la 12C n’a rien de si commune. À pleine charge en seconde, entre 3 000 et 7 500 tr/min, on pourrait mettre au défi quiconque (qui ne soit pas pilote de F1) de repousser son casque loin du baquet à la seule force du cou.
Le temps de cette boucle initiale, les réglages restent sur leur mode le plus souple même si direction, suspension ou passages des rapports paraissent déjà très affûtés. Tout à fait quelconque au ralenti, la sonorité du V8 biturbo reste ici discrète et malheureusement très ordinaire. Les Lamborghini Aventador ou Gallardo qui s’égosillent également aux quatre coins de la piste font autrement mieux côté sonorité.

Rapidement, deux constats apparaissent. D’une part, l’auto vire de bord, freine et accélère parfaitement à plat. Les mouvements de caisse s’avèrent quasi-inexistants, contrecarrés par la très efficace suspension active et son système antiroulis hydraulique. D’autre part, la facilité de prise en main se révèle étonnante pour une super sportive annonçant de telles performances (0 à 200 km/h de 9,1 sec, 1 000 m d. a. de 19,6 sec). À aucun moment on ne bataille pour tenir le train arrière sous l’effet du couple pourtant des plus généreux. Cela dit, le mode ‘Normal’ conserve un contrôle de la traction relativement présent, ce qui évite tout patinage à la reprise des gaz sans pour autant ‘freiner’ l’auto dans sa ré-accélération. Au terme du premier tour, on passe alors sur le mode ‘Sport’, censé offrir des passages de rapports plus vifs, des réglages de suspension plus fermes, et présenter un antipatinage plus permissif. Au bout de la ligne droite des stands vient le freinage le plus imposant du tracé. Même avec des disques standards en fonte (le carbone céramique reste en option), le résultat se montre ultra efficace, aidé par un aileron arrière qui, à la manière de celui d’une Bugatti Veyron, se déploie à la verticale comme un aérofrein. Il fait chaud, et l’auto a pourtant enchainé les tours de circuit avant que je n’en prenne les manettes, mais son dispositif de freinage ne souffre d’aucune perte de performances. Si l’un de mes confrères s’est plaint d’une course de la pédale de frein désagréable sur l’Aventador (‘rien ne se passe avant enfin, que la voiture veuille bien freiner en bout de course’), celle de la 12C met le pilote en confiance dès le premier freinage.

Désormais réglé sur son mode ‘Sport’, le châssis autorise de légères dérives à la ré-accélération, en particulier en sortie de virage serré. L’antipatinage ne se fait plus aussi intrusif sur le pilotage et une reprise des gaz suffisamment généreuse doublée d’un léger angle au volant permet de sentir l’arrière dériver dans le virage 5. La reprise d’adhérence se fait ensuite sans heurt quelques mètres plus loin. Pourtant, la 12C ne développe pas à ce stade de nature très joueuse, et conserve une réelle facilité de prise en main. Une fois le tracé mémorisé, on s’autorise un freinage tardif à l’approche du virage 8, un ‘S’ à négocier en seconde. On conserve un peu de frein tout en entamant le premier gauche. Contrairement à une 911 qui se déhanche ici davantage, la McLaren conserve un équilibre impérial. Le train arrière ne décroche pas non plus tandis qu’on chevauche le vibreur intérieur pour sortir en ligne, pied sur l’accélérateur. À l’approche de la ligne droite des stands, Rob tourne de nouveau les molettes, cette fois-ci sur le mode ‘Track’.

Instantanément, le son du V8 se transforme. D’une sonorité fade et discrète, on en vient à un grognement particulièrement présent au sein de l’habitacle. Ce dernier mode libère en effet les échappements, mais renvoie avant tout le son de la mécanique au travers des hauts-parleurs du cockpit. Malheureusement, le résultat est loin de se révéler satisfaisant. Le râle du V8 demeure à mille lieux des notes jouissives fredonnées par des Aston Martin V8 Vantage, Maserati GranTurismo ou Ferrari 458. Ni profond comme sur une GranTurismo, ni aigu à la manière d’une 458 ou même rageur comme dans une Aston V8, le 3.8 biturbo expulse là un grondement sans âme qui manque d »évoluer en tonalité au fil du régime moteur. Par ailleurs, le son renvoyé par le système audio de la 12C génère un effet surround très présent, et finalement peu agréable. On croirait un son ‘virtuel’. Pourtant pilote officiel McLaren et forcé de se maintenir corporate, même Rob Bell nous avouera en avoir plein les esgourdes après quelques tours en mode ‘Track’.

La 12C chausse des Pirelli PZero spécifiques à la structure renforcée.

Dernier tour de piste, ligne droite des stands… On décide de freiner encore un peu plus tard et attaque la pédale de gauche avec plus d’intensité. Impérial, le freinage ne bronche toujours pas, avant que la corde du virage 1 ne soit négociée sans difficulté. On aurait aimé pouvoir faire encore quelques tours de circuit afin de savoir jusqu’où repousser encore le point de freinage. Dans le virage 5, l’arrière se dérobe de nouveau à la reprise des gaz, générant cette fois-ci un angle un peu plus important. Dans cet ultime mode de réglage, l’antipatinage lâche clairement du lest. Toutefois, même si les accélérations se font toujours plus bestiales au-delà des 3 000 tr/min, le comportement de la 12C ne se montre toujours pas des plus joueurs à basse ou moyenne vitesse. On aurait pu imaginer la McLaren plus agressive et belliqueuse dans cet ultime mode.
Concentré sur le tracé du circuit et le comportement dynamique de l’auto, on n’aura guère constaté de changement radical quant à la vitesse de passage des rapports. Le mode ‘Normal’ permet déjà des passages ultra-rapides via la boîte à double embrayage à 7 rapports inédite développée par McLaren. À noter que cette unité possède également des modes ‘Auto’ et ‘Winter’, qui n’auront été ici d’aucune utilité, ainsi que d’un launch control. Autre particularité que nous n’avons pu tester : le système manuel de présélection des rapports.

L’on aurait bien sûr souhaité pouvoir cravacher un peu plus l’auto (le copilote McLaren s’avère très sympathique, mais il est là…), faire quelques tours de piste supplémentaires et surtout, la voir évoluer sur route. Sa suspension ‘Proactive’ y fait sans doute merveille afin de se jouer des irrégularités de la chaussée tout en conservant des mouvements de caisses minimaux grâce au système antiroulis actif, assez bluffant.
Les griefs jusqu’alors avancés contre la 12C concernaient notamment les sensations procurées, censées se montrer trop aseptisées face à la concurrence (et en particulier face à la 458 Italia, sa plus grande rivale). Ces remarques s’avèrent justifiées dans le cas de l’ambiance générale émanant de la McLaren, et de la sonorité de son V8. En revanche, si la 12C offre une facilité de prise en main déconcertante eu égard à ses niveaux de performances, elle n’en reste pas moins impressionnante. Accélération, freinages, équilibre dynamique… l’auto vous transporte dans un univers de performances du plus haut niveau. Mais on comprend au travers de ces quelques tours du circuit de Ricardo Tormo que la passion n’émane pas de l’auto comme ce peut être le cas dans une Lamborghini ou une Ferrari, et par extension, comme le souhaitent sans doute bon nombre de clients potentiels prêts à débourser 200 000 € pour un joujou de fin de semaine.

Rappelons-le, avec sa suspension active exceptionnelle et sa douceur mécanique à bas régime, l’auto excelle certainement au quotidien, à la manière d’une 911 Turbo. Mais si l’on prend plaisir à la mener finement sur piste, on souhaiterait presque un quatrième mode de réglage moteur/aides électroniques/sonorité. Non pas un mode qui autorise des performances ou des chronos toujours plus impressionnants, mais qui relève des plaisirs simples de l’automobile sportive : rugissements, fougue. En bref, un mode ‘Fun’.
Cela dit, c’est un peu chouiner que de parler ainsi. Car au sortir de quelques tours de circuit au volant de la 12C, admet-on le, on ne peut s’empêcher d’avoir le sourire. Et au sein de la petite dizaine de confrères qui m’accompagnait ce jour-là, la 12C a quasiment fait l’unanimité autour de la table du déjeuner, remportant les suffrages devant la Gallardo Superleggera, ou l’Aventador (70 000 € plus onéreuse). Il y avait toutefois une grande absente… la Ferrari 458 Italia.

Vous le savez certainement, le penchant de la MP4-12C à se montrer trop bien élevée a déjà fait couler pas mal d’encre. L’information est d’ailleurs remontée jusqu’à Woking. McLaren a donc retravaillé quelque peu sa berlinette. Ce modèle revu et corrigé a fait ses débuts officiels au Festival of Speed de Goodwood, ce weekend du 1er juillet. On attend donc impatiemment de pouvoir juger des rectifications apportées par McLaren, tandis que la marque vient également d’annoncer l’arrivée d’une version découvrable de la berlinette. Baptisée Spider, celle-ci pourrait se présenter comme un autre moyen d’accentuer les sensations de conduite de la 12C sans pour autant fragiliser ses performances ébouriffantes.

 

Test : McLaren MP4-12C
Moteur : V8, 3 799 cm³, biturbo Puissance : 600 ch à 7 000 tr/min Couple : 600 Nm à 3 000 tr/min CO2 : 279 g/km Transmission : Boîte 7 à double embrayage, Propulsion, ESC Susp. avant : Doubles triangles, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs actifs, antiroulis hydraulique Susp. arrière : Doubles triangles, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs actifs, antiroulis hydraulique Freins : Disques ventilés et perforés (carbone-céramique en option), AV : 370 mm, AR : 350 mm, ABS, EBD Jantes : AV : 8,5 x 19, AR : 11 x 20 Pneus : AV : 235/35 ZR19, AR : 305/30 ZR20, Pirelli Pzero Poids : 1 434 kg (à sec) 0 à 100 km/h : 3,3 sec (constructeur), 3,1 sec avec jantes Corsa en option 0 à 200 km/h : 9,1 sec (constructeur) 1 000 m d.a. : 19,6 sec (constructeur) Vitesse maxi : 330 km/h (constructeur) Prix de base : 201 000 €
Moteur95%
Comportement95%
Qualité & Design90%
Confort & Pratique70%
Emotion90%
LES +
  • Performances exceptionnelles
  • Efficacité
LES -
  • Sonorité du V8
  • Pas de mode 'pur fun'
88%Note Finale
Note des lecteurs: (34 Votes)
68%

6 Réponses

  1. Puriste

    Vous dites que la mclaren que vous avez essayez fait 600cv a 7000tr/min.
    Bizarre car toutes les mclarens 12c on reçues gratuitement la « mise à jour » gratuite leurs permettant d’avoir 620 cv a 7500tr/min.
    Et quand vous parlez du son de moteur que la 12c génère à travers les enceintes( genre bmw) vous parlez surement de l’ ISG de chez mclaren (Intake Sound Generator) qui comme sont nom l’indique ,fait acheminer le son de l’intake dans l’habitacle ( à la manière du sound symposer de porsche; et non pas comme l’horrible fake sound généré « synthétiquement » par les hauts parleurs comme bmw).
    Donc faut pas que vous confondez tous…
    Le SOund Symposer à la manière de porsche c’est acheminer le son de l’admission (intake) via une sorte de tuyaux qui rentre jusque dans l’habitacle pour diffuser le « VRAIS » son du moteur dans l’habitacle comme le fait mclaren dans sa 12c.
    Donc vous vous trompé quand vous dites que c’est via les haut parleurs comme bmw le fait.
    Mclaren et porsche ce n’est pas du faux son comme bmw qui lui fait passer un son de moteur pré enregistré dans les enceintes audio de la voiture.
    La solution de porsche et de mclaren et bien plus noble que l’horrible « solution » de bmw qui est complétement indigne d’une voiture de sport.
    Donc je sais pas c’est qui qui vous a raconté ce mensonge.

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