On ne se fait pas prier pour trouver la petite bête à evo. Un manque de réactivité par ci, un détail de finition par là, et avec la dernière Classe E de Mercedes, on a trouvé à redire, entre son amortissement façon péniche ou sa direction aussi communicative qu’un député venant de perdre son mandat. Aussi est-ce l’œil acéré et l’esprit acerbe que je me suis rendu à Affalterbach pour découvrir la nouvelle E63 AMG. Le sorcier allemand aura-t-il réussi à mettre en valeur l’excellent châssis que la E cache sous des tonnes de ouate ?
Les modifications cosmétiques apportées à la W212 – boucliers spécifiques, bas de caisse suggestifs, feux à fond noir, ailes avant élargies – renforcent encore l’aspect agressif de sa plastique anguleuse. Si on a droit à une visite des ateliers immaculés, où l’on monte les moteurs manuellement, voire à une démonstration sur banc du V8 de la future SLS (560 ch maxi apparemment), il faut attendre le lendemain prendre le volant de l’E63. Par rapport à celui de sa devancière, son V8 gagne 11 ch (525 désormais), voit sa consommation moyenne baisser de 12 %, mais surtout, s’attèle désormais à la boîte Speedshift MCT-7 inaugurée sur le SL63 AMG. Spécificité de cette transmission à 7 rapports, elle troque son convertisseur hydraulique contre un double embrayage à bain d’huile. Disposant de 4 lois (C – pour l’économie de carburant ! -, S, S + et M), elle est capable de changer de pignon en 100 ms, en désactivant des cylindres si besoin.
Cela dit, ce que l’on note dès les premiers tours de roue, c’est l’agréable fermeté de l’ensemble. Direction à démultiplication réduite de 22 %, voie avant élargie de 56 mm, suspension avant métallique (pneumatique à l’arrière seulement), carrossage avant nettement plus positif, barre antiroulis creuse, tout concourt avec succès à rendre la E plus réactive. Fini le chamallow roulant, place au châssis vivant. En ville, cet ensemble paraîtrait même un peu sautillant, mais dès qu’on arrive sur autobahn, tout change. Boîte et suspensions réglées sur S+, pied au plancher : ça déménage, et le volant permet de bien sentir la route. Le moteur est une pure merveille.
Linéaire ? Pas du tout ! Au contraire, presque creux à bas régime, il explose d’une rage joyeuse dès qu’on passe les 4 000 tr/min, avant d’attaquer tête baissée le rupteur fixé à 7 200 tr/min. La symphonie mécanique débute par un grondement inquiétant qui s’éclaircit puis se termine en apothéose métallique où l’on discerne avec plaisir le tapement typique des V8. Ce faisant, toute la voiture est parcourue d’une vague d’énergie inépuisable transmise aux roues arrière judicieusement contrôlées par un antipatinage indispensable sur chaussée humide.

Très vite, on bute littéralement sur le limiteur fixé à 250 km/h, alors que la boîte n’a pu égrener en toute vivacité que 5 rapports. A cette allure, la direction consistante et précise alliée aux trains roulants rigoureux procure une grande sécurité, confirmée par des freins progressifs et puissants (céramique en option). Sur réseau secondaire, on apprécie la réactivité sans faille de la boîte, qui répond instantanément aux injonctions des palettes. Quel progrès ! En rétrogradant, on a droit à de jolis coups de gaz complétés par de légères détonations en sortie d’échappement. Comme avec une Italienne. Dans les enchaînements de virage, la belle fait oublier ses 1 840 kg, sans toutefois se montrer aussi agile qu’une Quattroporte. En sortie, une simple pression sur l’accélérateur permet de faire dériver la poupe, en toute précision, tant l’auto s’avère équilibrée. Oui, je parle de Classe E sous l’aspect purement dynamique, et non sécuritaire. C’est sûrement le plus beau compliment qu’on puisse lui faire. La petite bête ? J’ai fini par la trouver : malgré le prix de base de 124 000 €, les porte-gobelets sont facturés 70 €. Vous êtes contents ?

S.S.

 

 

 

 

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