SPEEDFANS

Essai Audi R8 V10 Plus , la quadrature de l’anneau

Audi ne crée plus, Audi capitalise, comme le montre la nouvelle R8. Proche de sa devancière tant d’un point de vue esthétique que technologique, dispose-t-elle d’un arsenal suffisant pour inquiéter les références d’une catégorie bien encombrée ? Direction le Portugal et le circuit de Portimao pour juger des compétences de la V10 Plus…

Technique

Si l’ancienne R8 était une proche cousine de la Lamborghini Gallardo, la nouvelle dérive étroitement de l’Huracan. Elle en reprend notamment le V10 central de 5 204 cm3 bien connu. Ici doté d’une double injection, directe et indirecte, et d’une désactivation de cylindres COD en cas de faible sollicitation, il gagne 60 ch face à la version qui équipait l’ancienne R8 V10 Plus pour atteindre 610 ch (comme sur l’Huracan) alors que la consommation chute de 10 % pour s’établir à 12,3 l/100 km (287 g/km de CO2).

La chute de consommation s’explique aussi par le poids en baisse (1 555 kg), à cause du châssis spaceframe plus léger de 15 % mais 40 % plus rigide (c’est grâce au mariage de l’alu et de la fibre de carbone CFRP) que sur l’ancienne génération, voire la boîte S tronic à double embrayage comptant désormais 7 rapports. La transmission intégrale quattro comporte un différentiel central multidisque géré par électronique et refroidi par eau, qui peut envoyer 100 % du couple (560 Nm) sur l’avant ou l’arrière selon les conditions. Le train arrière reçoit un différentiel mécanique à glissement limité. Du drift en R8 ? Diantre !

Corollaire, les performances progressent, avec un 0 à 100 km/h expédié en 3,2 sec (9,9 sec sur le 0 à 200 km/h) et une vitesse maxi de 330 km/h. Elles se calquent sur celles de l’Huracan, à ceci près que l’Audi est 5 km/h plus rapide.

Celle-ci repose sur les suspensions à double triangulation (avant et arrière), l’amortissement magnétique restant une option. En revanche, les freins carbone-céramique sont de série, les disques avant (380 mm) étant pincés par des étriers à 6 pistons (355 mm et 4 pistons à l’arrière).

Au volant

De série, la V10 Plus reçoit des baquets très radicaux, aux renforts latéraux très marqués mais affublés d’un dossier fixe. Résultat, un inconfort notoire. En option gratuite, on peut obtenir les sièges de la V10 ‘standard’, plus souples et amplement ajustables, donc infiniment plus agréables sur route.

Le tableau de bord adopte le principe du ‘virtual cockpit’ inauguré par le TT, soit un combiné d’instruments TFT très largement paramétrable. L’ambiance est sportive mais élégante, sans fioriture aucune. Surtout, on profite d’une habitabilité fort respectable (plus que dans une Mercedes-AMG GT par exemple) ainsi que d’une bonne visibilité vers l’avant.

De série, l’équipement se révèle complet, avec la clim auto (mais pas bizone), le wifi intégré, le tuner numérique, la sellerie cuir Nappa, la navigation, la hifi B&O de 550 watts (parfaite pour écouter Eve, lève-toi de Julie Pietri) ou encore les appliques en laque noire. En même temps, à 199 000 € on peut se montrer exigeant, mais certains de ces éléments demeurent optionnels (quand ils sont disponibles) sur une Ferrari 488.

Contact, j’appuie sur le bouton rouge situé en bas à droite du volant. Le V10 s’éveille juste derrière moi dans un flamboiement sonore. Un touche circulaire, sous le bouton de démarrage permet d’augmenter encore le niveau des décibels si on le souhaite. Aseptisée, l’Audi ? Pas du tout ! A gauche du moyeu du volant se trouve la commande du Drive Select permettant de choisir entre 7 modes de conduite agissant sur la cartographie moteur, l’échappement, l’assistance de direction, la boîte ou encore les aides à la conduite, voire l’amortissement magnétique (option gratuite). En dessous, un bouton circulaire permet indépendamment de tout ceci d’agir sur l’ESP. Je règle le Drive Select en Dynamic, sorte de mode sport.

La voiture se montre très docile en manœuvres ainsi qu’en ville. Sur autoroute, elle apparaît très stable et suffisamment silencieuse pour parcourir de longues distances sans trop fatigue, sauf avec les baquets de série. Le confort se révèle nettement supérieur à celui d’une AMG GT S, grâce notamment à un amortissement infiniment mieux conçu. Mais une Ferrari 458 n’a rien à lui envier.

Mais si la R8 V10 Plus sait se comporter en bonne GT, que vaut-elle à un rythme soutenu ? Je mets pieds dedans à 90 km/h, la voiture semble hésiter puis administre un à-coup étonnant et quand la boîte a trouvé le bon rapport, on reçoit une poussée magistrale dans le popotin. Le V10 se réveille dans un rugissement rauque, et passé les 4 500 tr/min connaît un regain de vigueur assez fascinant. Il grimpe alors dans une fureur jouissive jusqu’aux 8 700 tr/min du rupteur où la boîte n’enclenche heureusement pas le rapport supérieur en mode manuel. Une pichenette sur la palette de droite et hop, la vitesse passe en un clin d’œil. La R8 marche fort, très fort et encore plus fort.

Elle profite d’une direction (à assistance électro-mécanique) à la fois directe, précise, consistante et informative même si sur ce dernier point, l’ancienne R8 faisait mieux encore. La voiture file droit comme un i, et profite d’une adhérence colossale, garantie par les pneus en 245/35 R19 à l’avant et 295/35 R19 à l’arrière. Évidemment, la motricité est totale, aussi, sur route, il est pratiquement impossible d’atteindre les limites du châssis, d’autant que le freinage impressionne par sa puissance, la pédale offrant un rendu agréablement granuleux.

Nous nous sommes aventurés sur des voies sinueuses et mal revêtues. Il faut se faire à la direction parfois trop directe, mais on apprécie le train avant chirurgicalement précis ainsi que le châssis étonnamment facile, même si la voiture secoue parfois sèchement sur les aspérités. On trouve parfois que l’amortissement est un peu lâche puis on regarde le tachymètre et on se rend compte qu’on évolue à des vitesses ahurissantes. La R8 est tellement bienveillante qu’on roule 50 km/h au-dessus des limites légales en montagne en ayant à peine l’impression d’effleurer son potentiel. Au lever de pied, l’échappement crépite, en accélération, le moteur hurle, le volant vibre entre les mains, la voiture réagit à la moindre injonction, bref, on prend un pied intense. Et on remercie Audi d’avoir conservé un bloc atmosphérique, synonyme de symphonie sonore mais aussi de réactivité totale.

Nous avons pu rouler sur circuit de Portimao. Un tracé sinueux, technique et vallonné absolument fabuleux ! Là, on a l’occasion de tester les limites de la voiture. Celle-ci ignore pratiquement le sous-virage, mais dans son obstination à tourner, elle permet à son train arrière de décrocher si on remet suffisamment de gaz en appui serré. Très amusant ! Dans les grandes courbes, si on relâche l’accélérateur, la R8 dérive des 4 roues et se contrôle alors très aisément, car elle prévient de tout ce qu’elle va faire. Les freins ? Puissants et super endurants, ils se voient commandés par une pédale judicieusement ferme permettant de doser très finement son action et d’appliquer une pression dégressive précise en appui. Rien à redire.

Les autos à moteur central sont hyper efficaces mais piégeuses à la limite : l’Audi évite ce dernier écueil. Sa limite sera sa boîte qui à haute température a parfois tendance à passer anarchiquement les rapports. Mais il faut avouer que la température ambiante flirtait avec les 35°C à l’ombre…

J’ai pu aussi rouler de nuit, afin de tester les nouveaux projecteurs au laser. Résultat ? Ils sont décevants. Si le faisceau est d’une longueur impressionnante, il est aussi très étroit et fixe, de sorte que les virages abordés ne sont pas éclairés. Pire, les panneaux lumineux bordant les courbes suffisent à piéger le système, qui repasse inopinément en code alors que justement on a besoin de toute la sauce. Le système progressif de BMW (avec le cache qui coulisse devant les ampoules au xénon) est à mon sens bien plus efficace.

Quant à la consommation : en usage très actif, elle s’établit à 20 l/100 km, ce qui semble presque économique vu la puissance et la radicalité de la voiture.

Avec la R8 V10 Plus, Audi propose une voiture de sport facile mais pas ennuyeuse, ultra-performante mais pas ravageusement gourmande, exclusive mais étonnamment pratique, civilisée mais capable de susciter des frissons rares de par sa musicalité, ses performances et son efficacité assez fabuleuse. Si seulement on pouvait avoir une boîte mécanique…

Face à la concurrence

199 000 € (+ 8 000 € de malus), c’est une sacrée somme. Il suffit d’ajouter 4 400 € pour profiter du prestige sulfureux du blason de la Lamborghini Huracan, tout aussi réussie. A 209 400 €, soit le surcoût de quelques options, on s’offre les 670 ch de la sublime Ferrari 488 GTB, encore plus performante (mais moins équipée). Quant à la McLaren 650S, elle réclame 236 500 €, ce qui semble beaucoup. Ceux qui veulent 4 places pourront opter pour la Porsche 991 Turbo S (200 400 €), accélérant encore plus fort que l’Audi mais roulant un peu moins vite.

Pour le reste

L’ancienne R8 a été produite à 27 000 unités entre 2007 et 2015, dont 630 ont été vendues en France. La commercialisation de la nouvelle sera effective le 17 septembre prochain, les livraisons débutant fin octobre/début novembre. Une version V6 suralimentée est prévue et un roadster devrait apparaître.

 

Essai Audi R8 V10 Plus , la quadrature de l'anneau
Moteur : V10, 5 204 cm3, CO2 : 287 g/km, Puissance : 610 ch à 8 250 tr/min, Couple : 560 Nm à 6 500 tr/min, Poids : 1 555 kg (2,54 kg/ch), 0 à 100 km/h : 3,2 sec (constructeur), Vitesse maxi : 330 km/h (constructeur), Prix de base 199 000 €, En vente : septembre
Moteur90%
Comportement90%
Qualité et design85%
Confort et pratique75%
Emotion90%
Les +
  • Fabuleux V10 atmo !
  • Comportement sûr et efficace
  • Pas aseptisée
Les -
  • Feux laser décevants
  • Style sans innovation
  • Quelques à-coups de transmission
86%Note Finale
Note des lecteurs: (67 Votes)
57%
Quitter la version mobile