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Essai : Jaguar C-X75 Prototype

Elle avait fait sensation sous forme de concept au Mondial de Paris 2010. Puis elle avait été confirmée pour la production, afin de jouer le rôle de vitrine technologique pour Jaguar. Hélas, mille fois hélas, le constructeur en avait annulé la mise en production pour des raisons épouvantablement économiques. Cela dit, il a tout de même poursuivi la mise au point de cette supercar hybride afin d’explorer les limites ultimes du downsizing. Et maintenant, il nous invite à l’essayer. Génial non ?

Technique

Comme toutes les nouvelles supercars hybrides, la C-X75 s’avère extrêmement complexe. Contrairement aux Porsche 918 Spyder, LaFerrari et McLaren P1, qui prennent comme base un très gros moteur thermique pour ensuite lui associer diverses technologies électriques, la C-X75 pousse à fond le concept du downsizing. Son cahier des charges tient en quatre points, aussi simples qu’ambitieux : ressembler une fois terminée le plus possible au proto de Paris, accélérer aussi fort qu’une Veyron de 0 à 160 km/h, ne pas émettre plus de CO2 qu’une Toyota Prius et offrir la même autonomie en tout électrique qu’une Chevrolet Volt.
Pour atteindre ces objectifs, Jaguar a conçu un groupe propulseur novateur, comprenant un bloc 1.6 thermique doté d’un turbo et d’un compresseur. Donné pour 502 ch et capable de régimes de 10 200 tr/min, ce moteur exceptionnel emprunte beaucoup à la F1. Il s’installe entre l’énorme pack de batteries, qui alimentent deux moteurs électriques de 204 ch chacun, le tout combiné portant la puissance de la Jaguar à 900 ch…
Avec une unité électrique animant l’essieu avant et une autre venant assister le 4-cylindres essence sur l’essieu arrière, la C-X75 est une intégrale. Minuscule, la boîte de vitesses robotisée mono-embrayage s’en remet à 7 rapports pour canaliser cette cavalerie.

Au volant

Les sensations délivrées sont extraordinaires. En mode tout électrique, la CX-75 apparaît plus rapide et vive que la 918 Spyder. Elle offre aussi une meilleure sonorité grâce à un ‘sound generator’ assez rigolo qui tente de reproduire la bande-son d’un moteur thermique afin de masquer les bruits d’air et de projection de caillou, très déplaisants. Alors oui, ça fait un peu ambiance Star Wars, mais sensoriellement, ça marche, on se sent plus impliqué dans la conduite.
On pourrait craindre qu’avec sa cylindrée très limitée, le bloc 1.6 n’offre pas le charisme requis à ce niveau de gamme. Mais il profite d’un vrai caractère : au ralenti, il gargouille comme un moteur de Groupe B préparé au maximum, et dans les tours, on retrouve des hurlements de monoplace. Entre les deux, il chante comme un V8 à vilebrequin plat et se révèle très doux. Etonnamment dénué d’inertie, il se révèle exceptionnellement réactif à l’accélérateur malgré une forte pression de suralimentation (jusqu’à 2,4 bars), qui lui autorise une puissance spécifique de 313 ch/l. Pour leur part, les moteurs électriques apportent une très appréciable vigueur à bas régime.

De son côté, la boîte ne change pas aussi vite de rapport que celle d’une 918 mais s’en rapproche fortement. Surtout, la C-X75 se révèle plus légère et agile au volant que la Porsche, même si sa direction électrique n’offre pas, loin s’en faut, le feeling fantastique de l’allemande. Néanmoins, la Jaguar impressionne franchement en matière d’amortissement, d’équilibre et par sa faculté à placer le pilote au cœur des évènements. Comme sur la 918, un des plus gros problèmes a été de donner à la pédale de frein des sensations acceptables. Si le résultat est infiniment plus convaincant sur la Jaguar que sur la Porsche (vraiment effrayante), la pédale de la C-X75 n’offre pas encore des réactions aussi limpides et linéaires qu’il le faudrait dans une voiture aussi rapide. D’ailleurs rapide, le mot est faible…
Heureusement, alors que je ne connaissais ni la piste d’essai de Jaguar à Gaydon ni la CX-75, celle-ci s’est révélée très naturelle et rassurante, même à plus de 300 km/h dans la grande ligne droite.

Face à la concurrence

La C-X75 fait très bonne figure. Technologiquement, c’est la plus avancée des supercars hybrides actuelles : la densité énergétique des batteries et le rapport taille/puissance des moteurs se posent en références. On est aussi étonné par la volonté de Jaguar de peaufiner à ce point un engin aussi sophistiqué, voire révolutionnaire.
La C-X75 rivalise sans problème avec la 918 côté puissance et performances, et s’avère tout aussi aboutie en tant qu’hybride rechargeable. Et elle pousse le bouchon encore plus loin dans sa recherche obsessionnelle du meilleur rendement énergétique. Beaucoup d’observateurs, votre serviteur compris, ont ressenti un certain scepticisme quand Jaguar a annoncé utiliser un moteur 1.6. Mais celui-ci dérive très étroitement d’une étude de bloc de F1 que Jaguar a abandonnée récemment, aussi il se révèle époustouflant à l’usage. A lui seul, il place la CX-75 dans une classe à part. Si on ajoute dans l’équation un design encore plus séduisant sur le prototype essayé que sur le concept de salon, on obtient un engin dangereusement séduisant.

Les ingénieurs du programme C-X75 sont les premiers à reconnaître qu’ils auraient encore pas mal de pain sur la planche pour l’adapter à la production, mais d’après notre expérience à son volant – et comparée à la 918 Spyder, très proche de la série, elle – on peut dire qu’elle se révèle aussi capable que désirable.
On n’en regrette que plus amèrement qu’elle ne soit jamais proposée à la vente. Mais avec ces diables d’Anglais, tout reste possible…

Pour le reste

Parmi les sources d’inspiration principales de la C-X75 figure la XJ13, des années 60. Cette auto, mort-née elle aussi, avait été spécifiquement conçue pour s’engager les 24 Heures du Mans mais s’était d’un coup vue frappée d’obsolescence avant même de s par la faute d’un changement de règlement. Ça ne l’a pas empêchée de devenir une des Jaguar les plus iconiques qui soient. Après notre essai de la C-X75, si on ressent une grande peine quand on se dit qu’elle ne sera jamais produite, on se dit aussi qu’elle atteindra elle aussi ce statut d’icône tout en ayant donné un avant-goût formidable de son potentiel fabuleux.

 

Crédits EVO magazine

Essai : Jaguar C-X75 Prototype
Caractéristiques Moteur : 1,6 litre, turbo + compresseur, 2 unités électriques de 150 kW Puissance : 502 ch à 10 000 tr/min (essence), 900 ch (thermique + électrique) Couple : 1 000 Nm (combiné) Vitesse maxi : > 320 km/h (constructeur) En vente : Jamais
Moteur95%
Comportement85%
Qualité & Design69%
Confort & Pratique35%
Emotion90%
LES +
  • Hurlement du 4 cylindres
  • Vélocité hallucinante
LES -
  • Ne sera jamais produite...
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