Débarrassons-nous d’abord des mauvaises nouvelles, cela laissera plus de place pour les bonnes. Il y en aura forcément puisque nous avons affaire là à une BMW mue par un V8 4.4 biturbo développant 550 ch pour un couple de 680 Nm, qui la catapulte de 0 à 100 km/h en 4,7 sec et lui fait atteindre 275 km/h en pointe.

Alléchant non ? Où est le souci alors ? Ces chiffres sont ceux du X6M, un engin qui se pose en contradiction totale avec les promesses du département Motorsport de BMW: jamais de SUV. Pour enfoncer le clou, ce monstre brave tous les tabous de M : il s’offre une suralimentation, une boîte automatique et une transmission intégrale.
Du reste, quelle idée de lancer durant la pire crise économique de ces 50 dernières années un 4×4 ultra puissant de 2,4 tonnes destiné à tailler des croupières aux Cayenne Turbo S et Mercedes ML63 AMG ? Kay Segler, patron du département M, ne voit pas en eux de vrais rivaux, sauf que côté puissance et prix, ils sont en opposition frontale !

Lors la conférence de presse, à Atlanta, à deux pas de l’usine de Spartanburg où seront construits les X5 et X6 M, Segler nous livre quelques réflexions étonnantes. Un : cela fait 10 ans qu’ils essaient de créer un SUV à hautes performances, mais ce n’est que maintenant qu’ils disposent de la technologie pour le mettre au point. Deux : le public était extrêmement sceptique sur la M5 il y a 25 ans avant d’en reconnaître le talent et le même raisonnement s’appliquera au X6. Trois : le département M recherche l’innovation, de nouvelles technologies et à créer du plaisir de conduire dans la plus reculée des niches du marché. Quatre : le X6 M est le seul SUV de sport. Six : s’il y a écrit M dessus, alors c’est un vrai M. Cerise sur le gâteau, le lendemain, on nous annonce que le X6 M a bouclé le Nürburgring plus vite que la M3 E46 alors que nous nous engageons sur le circuit de Road Atlanta pour une demi-douzaine de tours, dans la chaleur moite d’un après-midi géorgien. Voilà une piste délicieuse, 4 km de montées, de descentes abruptes et de virages serrés complétés de deux belles lignes droites, qui a accueilli les plus excitantes courses de superbike.
Et si, après tout, un miracle se produisait ? En effet, le X6 se comporte brillamment vu son gabarit, à la grande stupéfaction de médias sceptiques. Sans aucun doute, le X6 M dégage une grande agressivité. Gigantesque, posé sur des jantes de 20 pouces, arborant une proue remodelée pour accueillir d’énormes prises d’air refroidissant le moteur et les gros freins, c’est une terreur des rétroviseurs. D’autant plus que pour le déposer, il faudra piloter une sacrée sportive. Dès que la piste en laisse la possibilité, j’écrase l’accélérateur et le V8 biturbo accouplé à une boîte automatique ZF adaptée catapulte les 2 380 kg de l’ensemble vers l’horizon sans brutalité ni effort apparent, aidé par son couple copieux. L’aube d’une révélation ?
Non. Sur cette piste, son poids (115 kg de plus qu’un xDrive50i) se fait immédiatement sentir, certes pas quand il s’agit d’avaler une ligne droite ni sur la vitesse de passage en virage, mais bien sur l’équilibre et l’agilité, nettement plus convaincants sur les versions moins puissantes. Lors d’un gros freinage en descente depuis 220 km/h à l’abord d’un enchaînement droite/gauche, le X6 M se plante sur son train avant et louvoie de la poupe, ce qui empêche de continuer à appliquer du freinage au moment où l’on braque, une technique nécessaire pour lutter contre le sous-virage chronique de ce 4×4, même avec les aides électroniques débranchées. Aussi efficace le système Dynamic Performance Control soit-il pour répartir la puissance entre les 4 roues afin d’optimiser motricité adhérence et motricité, il réduit à la portion congrue la part du pilote, qui n’a plus le choix qu’entre neutralité et sous-virage massif. Survirer en se servant de la puissance est tout simplement impossible, du moins sur le sec.
Voilà qui réduit considérablement l’agrément de conduite, à l’instar de la sonorité du V8, évoquant celle d’un banal 4-cylindres. Heureusement, à faible accélération, le moteur se fait oublier. L’excellent maintien de la caisse, l’amortissement souple et l’habitacle ouaté (mais étriqué) font du X6 M un engin de choix pour allier vitesse et grand confort. Sauf qu’on peut en dire autant du xDrive50i, facturé 35 000 € de moins, pas tellement moins performant et autrement plus agréable à l’oreille. C’est la version à prendre si l’on veut un X6 performant. Le M, certes efficace, offre encore moins de plaisir que ce que nous craignions.

D.V.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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