Toute chose n’existe qu’avec son contraire. Ainsi, la vague de véhicules dits verts qui nous submerge s’accompagne d’une sympathique résurgence des voitures plaisir. Même la très sérieuse maison Peugeot sort de sa monoculture HDi pour nous proposer un coupé aussi inutile qu’attirant : le RCZ. Première voiture frappée du lion à ne pas porter de nom numérique, cette sportive a été présentée sous forme de concept au salon de Francfort 2007. Devant l’accueil inattendu qu’elle a reçu, les dirigeants se sont dit que peut-être, on pourrait s’en servir pour affûter les griffes du lion. Après le salon de Genève 2008, la décision fut prise de la mettre en production, et ce, dans un délai de 2 ans et sans altérer son design. Pari tenu puisque nous voilà en Espagne pour en tester la version définitive.
Esthétiquement, la RCZ évoque ce qu’aurait pu devenir la TT si Audi n’avait pas décidé d’édulcorer son style. Voilà une ligne musclée et très élancée, suggérant le mouvement même à l’arrêt. La lumière du jour met bien mieux en valeur les volumes très travaillés de la carrosserie, notamment le toit dont le double bossage se poursuit sur la lunette arrière, en verre. On apprécie aussi les arches en aluminium, élégantes, ainsi que le dessin des jantes noires. J’aurais apprécié que les feux avant soient spécifiques (ce sont ceux de la 308), mais les contraintes de coût et de temps sont impitoyables.

La RCZ côté technique


Le coupé français, ou plutôt autrichien puisqu’il est assemblé à Graz par Magna-Steyr, repose sur la plate-forme 2 du groupe PSA (que l’on retrouve dans les 308, 3008 et 5008 notamment). Par rapport à une 308 berline, la RCZ voit son assiette abaissée de 23 mm, le centre de gravité s’établissant lui 40 mm plus bas. Les voies s’élargissent : + 44 mm à l’avant et + 63 mm à l’arrière. En revanche,  les suspensions restent classiques : McPherson triangulé à l’avant et essieu de torsion à l’arrière. Point de multibras ni de pivot découplé, dommage, mais on découvre entre les roues antérieures une barre anti-rapprochement inférieure fort intéressante. Le poids se cantonne à 1 297 kg.
Côté moteur, nous avons affaire un bloc 1.6 PSA/BMW mais ici en 200 ch. Pour la première fois, il combine injection directe, suralimentation (turbo twin-scroll), double déphaseur et surtout levée variable des soupapes. Même Mini n’a pas droit à tous ces raffinements !
Ceux-ci autorisent une puissance de 200 ch à 5 500 tr/min, pour un couple de 270 Nm dès 1 700 tr/min. Peugeot annonce un 0 à 100 km/h en 7,5 sec, pour une vitesse de pointe de 237 km/h. Avec un rapport poids/puissance similaire, la TT 2.0 TFSI est donnée pour 240 km/h au maxi et 6,6 sec sur le 0 à 100, mais elle profite de 10 Nm supplémentaires… Et de données officielles de puissance certainement sous-évaluées…
A bord de la RCZ


Peugeot, au contraire de VW avec la Scirocco, s’est fendu d’une planche de bord spécifique pour la RCZ. Elle a fait l’objet d’un certain soin, se revêtant au choix d’un plastique imitant le cuir (jusqu’aux coutures) ou de véritable peau d’animal mort. A vrai dire, il faut vraiment avoir les deux matériaux sous les doigts pour se rendre compte de la différence, le synthétique ayant été fort bien travaillé. Etonnant !
En revanche, le bas du tableau de bord recourt à des matériaux quelconques, tout comme les ouïes de désembuage latéral, jurant particulièrement avec le cuir beige du tableau. L’impression d’ensemble demeure favorable, même si évidemment, la finition reste sensiblement inférieure à celle d’une Audi TT, il est vrai nettement plus chère.
La position de conduite s’avère bien étudiée, mais on déplore la trop faible longueur de l’assise du siège. Les places arrière sont à réserver à des enfants punis ou des adultes masochistes, mais le volume du coffre, variant de 321 à 639 l suivant qu’on a rabattu la banquette ou pas, s’avère très honorable.
Sur la route avec la RCZ


A la mise en route (avec une vraie clé, ce que j’apprécie), le moteur se signale par sa discrétion. Rapidement, l’amortissement révèle un excellent compromis entre confort et maintient de la caisse, tandis que la boîte rapide et précise, procure un agrément inhabituel sur une Peugeot moderne. De plus, le pédalier très bien étudié autorise un talon/pointe instinctif.
Nous sommes sur les routes lisses du nord de l’Espagne : pas idéales pour juger du caractère informatif d’une direction. Dans ces conditions, celle de la RCZ ne mérite que des éloges, puisqu’elle permet de placer la voiture au millimètre sans jamais paraître artificielle dans son rendu.
Mais là où la Peugeot surprend, c’est au niveau du train avant. Souvenez-vous : pas de double triangulation, pas de pivot découplé, ni de différentiel à glissement limité, même électronique. Surprise : des effets de couple pratiquement inexistants, et une motricité sans faille, même quand on écrase l’accélérateur en sortie d’épingle. La barre anti-rapprochement et la grande rigidité du châssis prouvent que des solutions simples mais peaufinées peuvent donnent des résultats excellents. En tout cas, la TT 2.0, malgré sa structure mixte acier/alu et ses amortisseurs rhéologiques, apparaît nettement moins rigoureuse, en deux roues motrices.
Et si on débranche l’ESP ? La RCZ ne change absolument pas de visage, repoussant toujours très loin la limite du sous-virage. Beau travail. Total, on s’amuse comme un petit fou dans les montagnes. La Peugeot avale avec la même aisance les grandes courbes et les virages serrés, tout en demeurant remarquablement stable et silencieuse sur autoroute. Surveillez le compteur !
Le tout, sans ennuyer son pilote. Au contraire, celui-ci profite du bon feedback renvoyé par les diverses commandes, ce qui permet d’oublier que le train arrière a totalement oublié ce côté joueur qui a tant fait pour la réputation des 205 GTI, 309 GTI, 106 S16 et autres 306 S16. Cela dit, le bitume très peu abrasif de ces routes ne permet pas de bien caler le train avant, stratégie qui favorise la rotation de la poupe. Ces excellentes impressions se confirment sur chaussée dégradée, où la RCZ ne démord pas de sa trajectoire ni ne se transforme en shaker, malgré ses jantes de 19 pouces. Le freinage se signale par sa puissance et son endurance, même à la suite d’une descente de col éprouvante, il a fini par couiner et trembloter, mais sans perdre de son efficacité. Le seul grief concerne l’assise du siège, échouant à maintenir correctement les cuisses. Résultat, on se cale à l’aide de la console centrale rigide (l’Alfa GT offre un coussin  pour épargner les genoux) ce qui devient douloureux à la longue.
La visibilité ne pose pas de souci, ce qui est précieux en montagne, mais on aurait aimé un toit translucide pour l’ambiance à bord. Hélas, la RCZ ne devrait jamais en bénéficier.
Quant au moteur, il ne manque pas de santé, même si le 2.0 TFSI du groupe VW se révèle sensiblement plus vif et costaud. Peugeot a en tout cas soigné la sonorité du bloc 1.6 équipé d’un ‘sound system’. Un T branché sur l’admission aiguille une partie de l’air vers une membrane qui vibre et souligne la sonorité rauque et agréable de la mécanique. Celle-ci se montre très souple mais aussi énergique, ne rendant les armes qu’à 7 000 tr/min. Voilà qui change du THP des 207, s’essoufflant à 5 200 tr/min ! Cela dit si Peugeot annonce une consommation mixte de 6,9 l/100 km, la nôtre s’est établie, en conduite sportive, à 15 l/100 km. Effet turbo et déphaseur oblige.
Bilan


Affichée à moins de 30 000 € (pour des livraisons à partir de l’été prochain), la RCZ s’avère bien placée face à l’Audi TT 2.0 TFSI (36 870 €), un peu moins face à la VW Scirocco 2.0 TSI Sportline (28 930 €). Elle offre un équipement complet (clim bizone, Bluetooth, ESP, jantes de 18, aileron mobile) mais ne propose que des possibilités esthétiques de personnalisation (pas de siège sport par exemple, ni de châssis plus affûté). Elle constitue en tout cas une proposition séduisante pour l’amateur de conduite, ce que Peugeot n’avait pas proposé depuis longtemps !
S.S.

Les +
Châssis étonnant d’efficacité
Agrément dynamique
Moteur très plaisant

Les –
Siège à améliorer
Détails de finition
Pas de toit ouvrant ou translucide

Note : 4/5

Caractéristiques
Moteur  : 4 cyl. en ligne, 1 598 cm3, turbo
Puissance maxi : 200 ch à 5 800 tr/min
Couple : 255 Nm à 1 750 tr/min
Vitesse maxi : 240 km/h (constructeur)
0 à 100 km/h : 7,5 sec (constructeur)
En vente : juin 2010

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